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Voyage d’étude Agronomie 2019 en Suisse : de la diversité dans les couverts

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Du 25 au 27 mars 2019, des techniciens de la Chambre d’agriculture et des agriculteurs sont partis à la rencontre de leurs homologues suisses pour partager et échanger sur les pratiques en grandes cultures.

La Suisse est sensibilisée depuis longtemps à la qualité des sols, ce qui se concrétise dès 1988 par la mise en place du Service de la protection des sols et des actions de développement des pratiques d’agriculture de conservation des sols. Après la Provence en 2016, l’Auvergne en 2017 et le Sud-Ouest en 2018, la 4ème saison s’est donc déroulée en Suisse, dans les cantons de Genève, Berne et Vaud.

Les couverts relais : des couverts d’été et d’hiver semés ensemble
Rencontre avec AgriGenève (Canton de Genève)

AgriGenève est un rassemblement de Ceta qui compte 300 adhérents dont 180 orientés en grandes cultures. En 9 ans, sous l’impulsion de son technicien, Nicolas Courtois, venu en Ariège pour l’Agrodays n°2 sur la réduction du travail du sol et le semis direct (26 octobre 2016), le canton de  Genève est passé de 20 ha en semis direct à 800 ha en semis direct sous couvert. Après des résultats très mitigés en simplification du travail du sol, AgriGenève a organisé un voyage en France à la recherche de solutions. A leur retour, ils avaient identifié le pilier manquant : les couverts d’interculture et que les 3 piliers étaient nécessaires pour pratiquer l’agriculture de conservation des sols – travail du sol minimal, couverture du sol permanente et rotation. A nous aujourd’hui de leur rendre visite !

Afin d’assurer la couverture permanente des sols, un travail important a été réalisé sur les couverts végétaux, avec dans un premier temps des couverts gélifs puis dans un second temps des couverts relais. Les couverts d’été, implantés juste après la moisson des pailles sont réalisés avec des mélanges d’au moins 5 espèces au minimum, idéalement une dizaine, avec au moins 50% de légumineuses (sauf avant culture de légumineuse). Le résultat : une biomasse de 8 à 10 tMS/ha en 4 mois. La pluviométrie estivale est certes plus favorable au développement des couverts en été que dans notre région, mais les 11 commandements des couverts végétaux édictés par AgriGenève, sont source d’inspiration pour nous.

Les couverts relais

Pour prolonger l’effet dans le temps des couverts avant l’implantation d’une culture d’été, des essais portent sur l’introduction d’espèces non gélives dans des mélanges de plantes gélives : les couverts relais.

Les plantes non gélives repartent une fois les plantes gélives détruites.

Les espèces retenues pour ce type d’utilisation sont : le seigle, la navette (chou de chine type Buko) et la vesce velue.
 LES + DES COUVERTS RELAIS 

•Capacité à lever en été
•Production de biomasse à l’automne, avant le gel
•Résiste à l’hiver
•A nouveau, production de biomasse au printemps, avant le semis des cultures d’été
 
 LES – DES COUVERTS RELAIS 

•Difficulté de destruction du seigle avant le semis des cultures d’été
•Trouver des variétés résistantes au gel pour la vesce et la navette
 

 

Le colza associé

AgriGenève travaille également depuis 2010 au développement de couverts semés en association avec le colza.

Deux mélanges de couvert ont été testés : un mélange gélif A avec 7 espèces dont le nyger et le sarrasin pour leur développement estival rapide et une proportion importante de légumineuses (lentille, fenugrec, vesce commune, gesse et féverole) et un mélange non gélif dans lequel est associé au mélange A, du trèfle (violet ou blanc), de la luzerne ou du lotier.

Dans le cas des couverts non gélifs, le couvert de légumineuses est broyé ou fauché juste après la récolte du colza pour faire repartir la légumineuse. Les enseignements tirés des 7 années de colza associé : bien répartir ou même exporter les pailles du précédent, changer la place du colza dans la rotation (préférer un précédent blé à un précédent orge) et revoir la date de semis pour avoir des colzas levés au 15 août.
 

 LES + DU COLZA ASSOCIE AVEC UN COUVERT D'ESPECES GELIVES ET NON GELIVES 

• Réduction des herbicides (pas d’anti dicotylédone)
• Economie de fertilisation azotée (10 à 30 UN/ha)
• Couvert déjà en place sitôt la moisson
LE– DU COLZA ASSOCIE AVEC UN COUVERT D'ESPECES GELIVES ET NON GELIVES 

• Difficulté de maîtrise du couvert de légumineuses non gélives dans le colza : soit risque de concurrence avec le colza au printemps, soit couverture irrégulière

Visite de la plateforme « couverts végétaux » d’AgriGenève : 11
mélanges de 3 à 12 espèces, proposés en collaboration avec l’unique
coopérative du canton
Guide des couverts d’AgriGenève :
www.agrigeneve.ch/images/Guide_couverts_vegetaux_2018.pdf

Nicolas Courtois, technicien d’AgriGenève : « Le
couvert végétal maintient la parcelle propre si elle est
propre au début »

Du labour au semis direct : un essai en cours depuis 1994
Visite de la plateforme Oberacker (Canton de Berne)

Depuis 25 ans, la plateforme Oberacker offre des références techniques et économiques sur le semis direct et plus largement sur les pratiques innovantes en grandes cultures. Les points forts de cet essai sont d’avoir été mis en place par des chercheurs en collaboration avec des agriculteurs déjà connaisseurs du semis direct, et d’avoir ajusté l’itinéraire technique au fur et à mesure en intégrant les nouveaux acquis. Cela s’est traduit par des modifications sur la rotation, l’intégration de couverts végétaux, le changement des pratiques de fertilisation et de désherbage, et l’utilisation de nouveau matériel de semis.
Aujourd’hui, la rotation principale est la suivante : Pois (hiver ou printemps) - Blé tendre d’hiver - Féverole (hiver ou printemps) - Orge d’hiver - Betterave sucrière - Maïs ensilage
Ici aussi, la diversité dans les couverts est de mise avec 10 espèces (Vesce de printemps, Trèfle d’Alexandrie, Gesse chiche, Moutarde Sarepta, Radis chinois, Avoine rude, Nyger, Tournesol, Lin de printemps et Phacélie) afin de favoriser le développement et la diversité des mycorhizes et de concurrencer les adventices.

Le semis direct rentable après une phase de transition de 7 ans

Sur 20 ans d’essais, moyennant une rotation adaptée, les rendements du semis direct sont égaux ou légèrement supérieurs à ceux du labour, ce qui a une incidence positive sur la rentabilité économique. En analysant l’évolution dans le temps, une phase transitoire de 7 ans a été nécessaire pour atteindre cet équilibre, les rendements ayant été en moyenne plus faibles de 7% en semis direct les 7 premières années.

Une utilisation du glyphosate qui tend vers zéro

Toutes les cultures sont conduites en « extenso » c’est à dire que seuls les herbicides et les engrais sont autorisés. Jusqu’en 2006, le glyphosate était utilisé régulièrement avant le semis des cultures pour détruire les couverts et les repousses. Depuis 2007, l’utilisation du glyphosate dans le semis direct a pu progressivement être réduite et tend vers zéro grâce notamment au mélange concurrentiel d’engrais vert. L’Electroherb, un système de désherbage total par électrocution, est également utilisé sur la plateforme et donne des résultats prometteurs.

Passage de l’Electroherb

Andreas Chervet (à Gauche) et Wolfgang Sturny (à Droite), sur la plateforme Oberacker

Une des 6 parcelles de la plateforme « Oberacker ». Chaque parcelle est divisée en 2 bandes : l’une est semée en direct et l’autre est labourée, labour hors-raie de 12 à 15 cm de profondeur

De nombreux projets sont en cours sur la plateforme Oberacker , en particulier les semis précoces de céréales, la gestion de la fertilisation avec la méthode Kinsey, et les cultures en relais. A suivre !

Quelle couleur pour mon semoir ?
Rencontre avec Hanspeter Lauper (Canton de Berne) et Jonathan Christin (Canton de Genève)

Agriculteur et entrepreneur, Hanspeter Lauper conçoit et réalise, pour John Deere (JD) notamment, des équipements hydrauliques et électroniques complémentaires aux semoirs de semis directs. Le semoir JD 750 est équipé d’autoguidage en complément du guidage sur le tracteur, ce qui permet un semis très précis avec compensation de courbe, des chasse-débris rotatifs à relevage hydrauliques ont été ajoutés afin d’assurer un dégagement régulier des résidus, et 4 trémies assurent à fois des compartiments pour la semence, l’engrais, l’anti-limace et des petites graines de couvert. Avec le JD ExactEmerge, le semis du maïs se fait à 16 km/h : « plus on va vite, mieux l’élément semeur rentre dans le sol » précise-t-il.

Hanspeter Lauper, agriculteur et entrepreneur, un des fondateurs de l’association Swiss-No-Till

Egalement agriculteur et entrepreneur, Jonathan Christin a fait le choix d’investir dans plusieurs semoirs, à disques et à dents, pour s’adapter à toutes les situations.

Semoir Jammet de Jonathan Christin (Canton de Genève)

Optimiser le potentiel des engrais verts par le choix variétal
Rencontre avec Proconseil (Canton de Vaud)

Proconseil est l’organisme de développement agricole du canton de Vaud qui travaille aussi bien sur les questions de gestion de l’exploitation, économiques et administratives, que sur le conseil technique pour la production.
Sur des plateformes de couverts végétaux réparties dans le canton, plusieurs mélanges d’espèces sont testés en s’intéressant aux critères variétaux. En effet, Proconseil met l’accent sur la sélection variétal des espèces de couverts, en particulier en trèfles et vesces. Sur le modèle des mélanges testés par AgriGenève, plusieurs mélanges adaptés au contexte pédo-climatique et aux cultures du canton sont proposés. Le mélange de base, semé à 85 kg/ha, est composé de féverole, de pois fourrager, de vesce commune, de trèfle d’Alexandrie, et d’avoine rude, semé à 85 kg/ha. Il peut être complété par différentes espèces (seigles, trèfles, vesces…) assurant un relai hivernal après le gel des espèces du mélange de base.

Gérald Huber, conseiller en agriculture biologique de Proconseil sur une des plateformes «couverts d’interculture», Pampigny (Canton de Vaud)

Travail du sol superficiel en agriculture biologique (AB)
Rencontre avec Christian Streit (Canton de Vaud)

Après plusieurs années de pratique du semis direct sous couverts végétaux, Chrisitan Streit est revenu à un travail du sol superficiel avec un déchaumeur à dents en patte d’oie de type “scalpeur“ afin de mieux maîtriser les adventices en AB. Parmi ses différents outils, il utilise également une roto-étrille pour un désherbage mécanique dans des résidus de couverts végétaux.
Dans ce système en agriculture biologique où les engrais azotés sont onéreux, les légumineuses sont privilégiées dans les différents couverts de l’exploitation : semis en association avec le colza ou semis lors du dernier passage de désherbage mécanique des céréales à pailles. Ces différentes techniques permettent d’obtenir un couvert déjà développé au moment de la récolte de la culture et de gagner un temps précieux pour garantir l’implantation d’un couvert d’interculture!

Trèfle semé dans le triticale AB fin avril 2018

Colza AB semé le 22 août 2018 en association sur le rang avec du trèfle d’Alexandrie (variété Tabord)

L'équipe Agronomie, Aude Pelletier, Stanislas Poudou