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THESO : Retour sur quatre années d’expérimentations pour limiter les transferts d’herbicides en monoculture de maïs irrigué

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Le comité de pilotage qui s’est tenu le 24 mai 2019 marque la fin du projet THESO, Transfert HErbicides SOl et eau. Il est l’heure de faire le bilan de cet essai au champ de longue durée.

Des itinéraires techniques innovants en maïs : désherbage localisé, non labour, amendements organiques et couverts végétaux

La zone de cultures entre Ariège et Hers est située sur une plaine alluviale constituée de sols plus ou moins filtrants reposant sur les alluvions et la nappe de l’Ariège, ressource en eau vulnérable vis-à-vis des nitrates et des produits phytosanitaires. Des études réalisées par le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières) de 2008 à 2014 ont mis en évidence des concentrations élevées dans cette nappe, en particulier en nitrates et en herbicides utilisés sur maïs.
En parallèle, le domaine expérimental de Lamothe, géré par l’École d’ingénieurs de Purpan, expérimente depuis 2010 des pratiques innovantes en monoculture de maïs pour limiter le transfert des herbicides : désherbage chimique localisé sur les rangs de maïs au moment du semis puis en complément d’un binage sur l’inter-rang afin de réduire la surface traitée de moitié, et apport de matière organique, couverts végétaux et réduction du travail du sol pour accélérer la dégradation des pesticides.
Lancé début 2015, le projet THESO (Transfert HErbicides SOl et eau) a consisté à tester ces pratiques innovantes dans les conditions réelles d’exploitations agricoles de la plaine de l’Ariège afin d’identifier les leviers efficaces pour limiter les transferts d’herbicides vers la nappe. Il a été financé par le ministère de l’Agriculture, l’Agence de l’eau Adour-Garonne et Syngenta.
Six exploitations agricoles ont mis en œuvre un ou deux itinéraires techniques innovants sur des parcelles d’environ 1 ha, de maïs grain ou de maïs semence, en comparaison de l’itinéraire technique qu’ils pratiquent habituellement. Quatre récoltes de maïs ont été suivies, de 2015 à 2018, avec des conditions météorologiques contrastées. Les parcelles sont situées sur des sols représentatifs de la plaine, sablo-limoneux à limono-sableux, avec des teneurs en cailloux de 0 à 30%, de type "grausses" et "boulbènes".

 

Les itinéraires techniques du maïs testés dasn THESO
MM : Monoculture Maïs, REF : Itinéraire technique de l’exploitation agricole, NL : Non Labour, NLMO : Non Labour et apport de Matière Organique, 2025 : réduction de 50 % des pesticides, en référence
au plan Écophyto 2 dont l’objectif est de réduire de 50 % le recours aux produits phytosanitaires d’ici 2025.

 

Pour le désherbage localisé, l’investissement comprend une cuve avant multi-fonctions (désherbage dans ce cas mais peut être utilisé pour de l’engrais ou un autre pesticide) et deux pompes et kits de pulvérisation, l’un pour le semoir et l’autre pour la bineuse, pour un montant total d’environ 7 000 euros. Les buses sont choisies en tenant compte du volume de bouillie, de la vitesse d’avancement et de la hauteur de traitement.

 

Des bougies poreuses pour prélever l’eau du sol

   

Zones d'échantillonage (cercles noirs), constituées de cinq bougies poreuses dans les modalités MM-REF (gauche) et MM-2025 (droite)

 

Bougie poreuse avec tête en céramique à 50 cm de profondeur du sol et système de pompage pour prélever la solution du sol

 

Les 29 molécules appliquées ont été analysées dans l’eau du sol ainsi que trois métabolites, produits de dégradation des pesticides, de molécules herbicides. Les recherches de molécules n’ont été faites que si le produit contenant la molécule a été appliqué. La fréquence d’analyse dépend donc de la fréquence d’utilisation. Les nitrates ont également été analysés dans tous les échantillons.

 

Des molécules retrouvées dans l’eau du sol à 50 cm de profondeur

22 molécules ont été détectées au moins une fois et sept molécules n’ont jamais été détectées. Le S-métolachlore et le chlorantraniliprole sont retrouvés dans tous les échantillons où ils ont été recherchés. Les autres molécules les plus fréquemment retrouvées (fréquence de détection ≥90 %) sont l’azoxystrobine, le glyphosate, le nicosulfuron et la bentazone. Les concentrations les plus élevées ont été mesurées pour le
S-métolachlore, la mésotrione, et l’azoxystrobine.
En 2019, afin de limiter les impacts, Syngenta préconise de limiter l’utilisation duS-métolachlore à 1 000 g/ha sur maïs grain, soit 2,5 L/ha de Camix (DH* : 3,75 L/ha) ou 1,1 L/ha de Dual Gold Safeneur (DH : 2,1 L/ha).

Pas d’influence directe constatée des pratiques culturales testées sur les concentrations en pesticides dans l’eau du sol

Contre toute attente, l’analyse statistique des données ne montre pas d’effet général des pratiques innovantes testées. Même en appliquant deux fois moins de produit, les concentrations mesurées dans l’eau du sol ne sont pas systématiquement plus faibles. Cette étude montre que les transferts des molécules sont complexes, régis par les doses appliquées mais aussi par les propriétés du sol, les quantités d’eau (pluies et irrigation) et les caractéristiques physico-chimiques des molécules.


Nous vérifions le comportement contrasté de trois molécules :
• Le nicosulfuron est très soluble et peu adsorbé. Dans notre essai, l’eau et la matière organique ont peu d’effet sur la concentration de cette molécule dans la solution du sol car cette molécule est sûrement rapidement transférée plus en profondeur.
• Le glyphosate est très soluble et s’absorbe sur les constituants du sol. Nous observons qu’un excès d’eau a pour conséquence une concentration plus élevée dans la solution du sol.
à l’inverse, plus la matière organique du sol est élevée, moins les concentrations en glyphosate mesurées dans la solution du sol sont élevées.
• Le S-métolachlore est moyennement soluble et adsorbé. La tendance dans cet essai est la même que pour le glyphosate avec des teneurs plus élevées quand les excès d’eau sont importants et des teneurs plus faibles en présence de matière organique.

 

 

Combiner des pratiques et mettre en œuvre les principes agronomiques pour limiter les risques de fuites de produits phytosanitaires et de nitrates

De cet essai longue durée, nous retenons les points suivants sur lesquels faire évoluer les pratiques.

  • Elargir sa gamme d’outils en ajoutant des options de désherbage localisé, post-levée précoce, et le fractionnement des herbicides de prélevée

La pratique la plus courante en maïs est un désherbage de pré-levée systématique au semis avec principalement des produits à mode d’action racinaire suivi d’un ou plusieurs rattrapages en fonction des adventices observées.

 

  • Pas de solution unique à toutes les molécules pour limiter le transfert des pesticides mais un rôle clé de la matière organique

Chaque molécule a des caractéristiques physico-chimiques propres qui ont une influence sur leur devenir dans l’environnement. De ce fait, le type de sol et les pratiques agricoles affectent de manière distincte le devenir de chaque molécule. Nous ne pouvons donc pas mettre en avant des pratiques qui seraient efficaces pour limiter les transferts dans toutes les situations de type de sol et de molécules.

  • Irrigation et fertilisation azotée : mieux les gérer pour limiter les adventices et les facteurs favorables aux transferts

Tout excès d’eau et d’azote non utilisé par la culture profite aux adventices. Une gestion au plus près des besoins permet de limiter le salissement de la parcelle. L’utilisation d’outils de pilotage de la fertilisation azotée tels que le bilan azoté et le réajustement du rendement objectif en cours de culture sont à mettre en œuvre. De même, il est vivement conseillé d’utiliser des outils de pilotage de l’irrigation, tels que les sondes tensiométriques ou capacitives.

  • Limiter le stock et la levée de graines d’adventices : éviter la montée en graine et récolter les graines d’adventices à maturité

Certaines adventices ont des levées échelonnées et montent en graine en fin de cycle, alimentant ainsi le stock pour l’année suivante. La récolte des menues pailles sur blé entraîne au bout de quelques années une diminution du salissement et une augmentation du rendement.

 

  • Rotations cultures d’été et cultures d’hiver : casser les cycles de mauvaises herbes

Les adventices s’adaptent au cycle des cultures : ce ne sont pas les mêmes sur cultures d’été que sur cultures d’hiver.

 

 

Retour en vidéo sur cette expériementation

 

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