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Stratégie de fertilisation : Outils d'analyses et interprétations

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Le 15 janvier 2024, Guillaume TANT, agronome et expert des sols du CER France Mayenne est venu en Ariège nous parler de stratégie de fertilisation dans le cadre du groupe 30 000 ABC Lèze & Co composé de 12 agriculteurs en agriculture biologique de conservation de sols dans les secteurs de la Lèze et du Mirapicien. En se basant sur les fondamentaux du fonctionnement des sols et des plantes, l’objectif est d’apprendre à interpréter ses analyses de sols et découvrir les analyses de sèves pour adapter et optimiser sa stratégie de fertilisation.

LA PHOTOSYNTHÈSE COMME POINT DE DÉPART
Pour gérer les minéraux du sol, il faut gérer la photosynthèse. La capacité des plantes à synthétiser le CO2 et le H2O en sucre et oxygène grâce à la lumière est le point de départ pour comprendre l’activité biologique de son sol. La sécrétion de sucre par les plantes permet de nourrir les microorganismes qui vont alors se multiplier et solubiliser les éléments nutritifs, c'est-à-dire les libérer sous une forme assimilable, pour s’alimenter. C’est notamment le cas pour le phosphore et le magnésium. Une fois que les microorganismes meurent, ces éléments sont disponibles pour la plante. Mais cela à condition que la plante soit approvisionnée en CO2, d’où l’importance de la structure du sol.


PREMIER LEVIER POUR UNE STRATÉGIE DE FERTILISATION OPTIMISÉE : LA STRUCTURE DU SOL
La simple réalisation d’un test bêche, suffit à déterminer la présence d’une semelle de labour et la nécessité de devoir faire un passage de fissurateur. Ayez le réflexe de vérifier l’état de vos sols fin avril quand les sols sont bien ressuyés surtout lorsque les semis d’automne ont été compliqués car un sol compacté est une perte de 50% d’azote. La profondeur du travail doit être 5 cm en dessous de la semelle et l’écartement entre les dents de x1,5 de la profondeur de travail. Attention néanmoins à ne pas excéder les 50 cm d’écartement. Le fissurateur ne doit pas être systématique mais plutôt réalisé, en condition sèche, sur la tête de rotation avant une culture type colza ou maïs ou avant un couvert semé dense à base de graminées type avoine pour que les racines puissent conserver la bonne structure obtenue.


AVANT DE FERTILISER, FAIRE L’INVENTAIRE DE SON SOL
L’intérêt des analyses de sol est de faire l’inventaire des ressources de son sol, d’identifier les éléments minéraux présents et s’ils sont en excès ou en carence. En se basant sur la CEC et le pH, on peut quantifier le « frigo » de son sol (CEC) et sous quelle forme se trouvent les éléments minéraux. Un pH légèrement acide (pH = 6,5) favorise la solubilisation de la majorité des éléments minéraux. Il ne faut donc pas négliger le besoin d’un chaulage. A l’inverse, un sol à tendance basique comme dans les argilo-calcaires, le calcium, et plus précisément les carbonates (CO3) rendent difficile la circulation des éléments. Pour diminuer le pH, il faut miser sur l’augmentation de l’activité biologique ou via l’apport d’acide externe sous forme de soufre élémentaire ou de sulfate par exemple. Enfin, la matière organique a justement un rôle essentiel, notamment pour l’activité biologique grâce à ses réserves d’éléments nutritifs et l’apport de carbone comme substrat énergétique pour les organismes du sol.


L’IMPORTANCE DES OLIGO-ÉLÉMENTS
Au-delà, des éléments minéraux qui ont l’habitude d’être pilotés comme le NPK, une attention doit être portée sur le rôle des oligoéléments.

Pour rappel, les éléments minéraux sont en interactions et leurs formes assimilables dépendantes du pH, il ne s’agit donc pas toujours de combler une carence mais d’identifier les excès d’éléments qui pourraient bloquer l’assimilation des autres alors qu’ils sont présents dans le sol, d’où l’importance de contrôler son pH.


POUR ALLER PLUS LOIN : LES ANALYSES DE SÈVES
Toujours accompagnés d’une analyse de sol, les analyses de sèves permettent de mieux comprendre la dynamique de nutrition de la plante et la disponibilité de tous les éléments nutritifs du sol, y compris des oligoéléments. Avec 3 échantillons tout au long du cycle cultural et une distinction entre les feuilles « jeunes » et « vieilles », il est possible de déceler si la plante puisse dans ses ressources ou si elle utilise les ressources du sol.

 

 

Éléments mobiles :
NO3 : Forme de l’azote qui oxyde le milieu et réduit la disponibilité des oligoéléments. Favorise la croissance au détriment des défenses immunitaires


Possible de déduire la quantité de protéine : (N+NO3+NH4+) - Ntotal
Si le résultat est négatif, la plante fait une protéolyse (puisse dans ses sucres et protéines car n’a pas assez d’énergie)


N, P, K et Mg : J > V = carence


Éléments immobilisés :
Ca : Se référer à la valeur (dans l’exemple = faible)
B : J > V = carence


Autres éléments plus complexe dû à leurs changements de forme :
Si : J < V = normal car s’accumule dans le temps

 

ZOOM SUR LES ARGILO-CALCAIRES :
La particularité des sols argilo-calcaires est la présence de calcium qui rend difficile la disponibilité de la plupart des éléments minéraux à cause de son pH à tendance basique. Dans ce type de sol, la potasse est naturellement présente dans les feuillets d’argile mais indisponible et les excès de calcium induisent des carences en magnésium. Cependant, en regardant des analyses de sèves, on comprend également que le calcium dans le sol n’est pas forcément disponible pour les plantes. Il s’agit donc de réduire le pH du sol pour créer des acides légers qui permettront la solubilisation des éléments minéraux et notamment du bore qui permet l’assimilation du calcium. Pour diminuer le pH, il faut nourrir et stimuler l’activité biologique, via des apports de matières organiques, l’implantation de couverts végétaux, l’incorporation de résidus de cultures etc. Il est également possible d’apporter du soufre élémentaire ou de l’engrais soufré type Patenkali pour palier aussi aux carences de potasse et magnésium.